C-Ordell - Under Investigation

Chronique :


A San Antonio, plongée dans un Texas brûlant à travers les âges, la musique demeure et nous revient, comme un joyeux souvenir. On se rappelle d'une époque où les instruments chantaient, portés par des rythmiques toujours plus fortes. Le torse fièrement bombé, de grands bras aux couleurs ébène nous invitent avec chaleur. Un crâne rasé, est caché dans l'ombre. Derrière, les tissus chutent et une bâche froissée brille avec éclat. Pareille esthétique nous laisserait penser à l'un de ces ballets contemporains, pourtant C-Ordell nous arrive en 1995 sur son unique album, d'ores et déjà classique au panthéon du G-Rap. Terme quelque peu galvaudé par les temps qui courent, mais force est de constater que la mouture, dont nous administre l'intéressé, est de grande qualité. C'est donc sous l'égide de Clyde "Sugarbear" Williams III que C-Ordell signe sur "BLVD Records". Enregistré au "Sugar Jar Studio", la réalisation se soumet aux quatre compositeurs qui en animent les pistes avec brio. En effet, Mickael Parker, Finnesse 1, Ricé et Sugarbear se partagent le gâteau des onze plages qui se suivent. Bien que l'album semble court de prime abord, l'écoute quant à elle se révèle incroyablement dense. Dans une atmosphère baignée par le parfum des instruments véritables, se développe une identité unique, riche et acoustique. La basse est omniprésente, fidèle et constante aux mélodies qui éclaboussent nos tympans impartiaux. Rebondissante, grave, appuyée ou en retrait, les accords nous surprennent, cadencés par les rimes affûtées de l'artiste. Bien d'autres acteurs l'accompagnent et c'est ainsi que les nappes aux claviers s'ajoutent avec subtilité. Sirènes parfois stridentes lorsque le climat oppressant le demande, où chantantes lors des morceaux festifs, elles se mélangent avec harmonie et encensent des compositions d'une finesse rare. Le piano s'unit à l'orgue et le moog gronde. Un accent tout particulier a été mis sur les percussions, qui à chaque titre, diffèrent et offre ainsi une diversité inédite. Daryl Suratt, à la guitare, parcourt les longues cordes de son instrument en y explorant chacune des gammes. Véritable orchestre, chaque ingrédient s'adjoint à son voisin, pour un résultat édifiant. Les réalisations s'inscrivent dans un registre que l'on pourrait qualifier de progressiste. En effet, les nappes se superposent au fur et à mesure que le morceau s'écoule avec douceur. De multiples agréments viennent enrichir chaque piste, et on s'étonne de pareille structure. Difficile de cantonner l'ambiance qui émane de cet opus. Aux inspirations placées sous le grand astre du Funk, C-Ordell en visite aussi les ramifications. Le Blues mais aussi la Soul et le Jazz sont donc empruntés. Et c'est dans ce torrent d'influences, que la musique s'élève et nous charme de ses grâces les plus douces. Nul besoin de citer tel ou tel morceau tant la qualité se fait continu sur l'ensemble de l'album. C-Ordell s'avance avec un flow particulier. Nasillarde et pourtant imparfaite, la teinte qui s'en dégage épouse à merveille les productions délivrées par le quatuor inspiré. Et c'est donc avec plaisir, que verbes et mélodies s'entendent à la perfection. De nombreux refrains constellent la globalité de l'écoute. Hormis quelques rares pistes plus obscures, on se plaît à apprécier les timbres adoucies des vocalistes Denise James, Ricé, Adrian Myers ou encore The Next Level. Niveau collaboration, Lil'Sin est le seul à venir supporter C-Ordell. Plus qu'un soutien, il en hérite même d'une plage entière. C'est en quelque sorte une introduction, quand on sait que Lil'Sin sortira son album deux ans plus tard, sur le même label.Nous conclurons en affirmant que ce présent album est un petit bijou. Le climat qui s'en dégage est personnel. Les compositions, belles et envoûtantes, subliment une mouture aux reflets nacrés. Mélancolique, où une certaine noirceur noyée de tristesse transpire, la musicalité n'a pourtant été lésée. Définitivement classique, la scène du Texas recèle de maints trésors où les perles ne cessent de s'amonceler.

~ Sharingan Masta ~

Note : 17/20
Disponibilité : Plutôt rare.

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