Milk Man - Reminisce

Chronique :


C'est à Oakland en 1996 que la bière coule sur la pierre tombale, grise et austère. Le liquide dorée nous renvois l'éclat d'un soleil mourrant, obscurci par la mémoire chagrinée des âmes oubliées. Un souvenir, une pensée, une gorgée, quelques rimes soigneusement posées, Milk Man nous arrive donc sur son premier et unique album à ce jour. Directement placé sous l'étoile du Funk propre aux références de sa cité, à l'instar de ses pairs (Bad N-Fluenz, Tucole ou BNR pour ne citer qu'eux), c'est un album où les mélodies sont riches, douces et acoustiques, emmenées par un concert instrumental de valeur. On avait pu apercevoir Milk Man aux côtés de Master P en 1992 sur le "Who's Tha Killer" du collectif TRU. Depuis, de l'alcool à couler sur le marbre glacé des cimetières, et les rivalités ont éloigné nos anciens frères. Le milliardaire et opportuniste producteur s'est alors débarrassé de Milk Man, et c'est le cœur serré, empli de rancoeurs et de crus jurons, que ce dernier se produit aujourd'hui en solo. Quoiqu'il en soit, c'est avec dignité que sort son LP signé sur "Major Muzik", avec l'appui de Gary "Ed" Wise. A la production, Milk Man et Franklin s'associent sur sept plages dont un interlude pour un concentré de soleil et de basses appuyées. Effectivement, bien que peu de titres nous soient avancés, il faut se rendre à l'évidence concernant le travail apporté. Les réalisations ont été érigées avec soin et talent. Dans un premier temps, la quantité des instruments est très appréciable. Outre les nombreuses subtilités que nous apporte un jeu de claviers très inspiré, on retrouve de multiples riffs de guitares. The Bank gratte ainsi ses cordes avec brio, saturant les accords, s'attardant lors de grandes plaintes gémissantes et acoustiques. Les trois premiers titres sont véritablement G-Funk. "Reminisce", mélancolique, rend hommage aux amis disparus, célébrant les instants d'autrefois lors de réminiscences nostalgiques. Un titre phare où la candeur des choeurs accompagne un rythme nonchalant, bercé par les nappes fragiles et délicates. Sur "It's On", Milk Man crache haine et verve à l'égard de master P. Ce dernier en prend pour son matricule, lors de vers véhéments. La composition, claire et limpide soutient avec chaleur pareille mise à mort. "Caught Up" s'inscrit comme le second titre accrocheur de l'album. Fort d'une réalisation satinée, tout se dessine avec grâce et finesse, encensé par les chants soyeux et mélodieux. La suite est plus rude, moins chantante mais toujours aussi affûtée. Dés lors, on rejoint l'esprit caractéristique de Oakland. Fermant les yeux, on se laisse emmener, sentant sous notre nuque le cuir usé de la banquette d'une vieille Impala qui errerait dans les rues cuisantes de la ville. Entraînantes, les productions secouent, remuent, appliquent la patte redondante de l'esprit local. C'est pourquoi, pas un déchet n'est à relever. Les pistes se suivent sans se ressembler dans une ambiance parfaitement homogène. Milk Man nous propose un flow très carré. Les phases sont nombreuses. Son élocution explose, surprend, s'emballe puis se relâche avec adresse. On pourrait presque lire sur ses lèvres tant la diction est sans failles. Da Goonz, présent sur tout l'album, assistent notre artiste lors de rimes acerbes et étudiées aux côtés de Young Niggahs également. Afin d'asseoir cette volonté résolument G-Funk, bien que très orientée "Bay Area", une kyrielle de chœurs constellent les titres présentés. Monique Allen, Kaleiah Ubaka et Walter Phillips du funk-band Club Nouveau, ajustent leurs timbres feutrés sur de composition déjà excellentes. Cela confère à l'ensemble un caractère acoustique et harmonieux qui renforce la qualité de l'opus.Pour résumer, Milk Man, trahi par ses semblables, relève le pari avec honneur. Son seul album affiche une autentique musicalité et une volonté manifeste de bien faire. Instruments, refrains et productions de grande envolée sont à noter. Pour les amateurs des sonorités locales, on pourrait même parler de classique. L'album pêche néanmoins par une duré bien trop limitée. On aurait aimé en écouter davantage. On regrette également qu'un deuxième chapitre n'est jamais été au gôut du jour. Le titre, évocateur, en annoncait la couleur. Tout n'est désormais qu'un lointain mais agréable souvenir...

~ Sharingan Masta ~

Note : 16,5/20
Disponibilité : Une affaire reglée pour 20$, peut-être moins.

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